Gérard de Nerval, de son vrai nom Gérard Labrunie est un écrivain et poète Français né le 22 Mai 1808 et mort le 26 Janvier 1855, à Paris où il est retrouvé pendu à une grille au niveau de l'actuelle place du Châtelet. Il eut de nombreuses crises de folie, notamment de Février à Septembre 1941. Ses crises le forçaient à faire des séjours répétés en clinique. Durant ses moments de lucidité, il écrivit de nombreux chefs-d’œuvre tels que Sylvie, Les Filles du feu et Les Chimères. Nous nous appuierons d'ailleurs sur le poème "El Desdichado" extrait de ce dernier recueil.
"El
Desdichado", extrait du recueil Les
Chimères, est un sonnet de Gérard de Nerval. Nous allons voir comment le
mal-être et la folie de l'auteur transparaissent dans cette œuvre.
Dès le premier
vers, on remarque une énumération « le ténébreux - le veuf -
l'inconsolé » qui met en relief le désespoir et le mal-être mental de
Nerval. "Le ténébreux" fait référence à son état d'esprit sombre
puisqu'il sort de deux graves crises. "Le veuf" se rapporte à la mort
de l'actrice Jenny Colon en 1842, pour laquelle il éprouvait un amour à sens
unique à la limite de l'obsession. Certains prétendent d'ailleurs qu'il lui voua un culte après sa mort. "L'inconsolé" explicite sa tristesse et son
malheur suite à cette disparition. L'utilisation de l'expression "prince
d'Aquitaine" pour se désigner lui-même fait référence à Edouard de
Woodstock (1330-1376) qui était remarquable lors des batailles grâce à son
armure noire. Elle était, pour ses contemporains, une représentation
visible de sa noirceur d'âme, son esprit sobre. Cela se rapporte ici à celle de
Nerval : son handicap mental. Grâce à l'expression "ma seule
étoile est morte", on comprend à nouveau la référence à Jenny Colon qui
est accentué par la typographie du terme "seule". Cela insiste sur le
noir, le néant, le vide, le désespoir de l'auteur. L'oxymore "soleil
noir" associé au substantif "mélancolie" accentués
par leur typographie ainsi que par la métrique de l'alexandrin mettent en
valeur la tristesse, la noirceur et la folie de l'auteur. Nerval formule au
vers neuf deux questions directes "Suis-je Amour ou Phébus ?... Lusignan
ou Biron ?" Phébus étant l'un des noms d'Apollon, le dieu du chant, de la
musique, de la poésie, mais aussi de la purification et de la guérison. On peut
voir ici un rapport au handicap mental de l'auteur et à son souhait de guérison.
Lusignan (1159-1194) fut le roi de Jérusalem, il était maladroit et désastreux
dans son gouvernement. En opposition à Armand Louis de Gontaut-Biron (1747-1793),
militaire français et amant de Marie Antoinette qui connut une rapide
progression au sein de l'armée. Cette interrogation nous dévoile les doutes de
Nerval qui se demande s'il a réussi brillamment ou échoué dans sa vie. On peut
penser que tout ceci est une remise en question de l'auteur face à son
handicap. Pour finir le vers douze "Et j'ai deux fois vainqueur traversé
l'Achéron" peut faire référence à deux événements marquants de la vie du
poète : ses deux séjours en prison, l'Achéron étant une représentation
métaphorique de l'univers infernal du milieu carcéral. Ou bien, ce peut être un
rappel aux deux crises précédant de peu la rédaction de ce poème, ici
l'Achéron, le fleuve des enfers, ferait référence à la folie de Nerval.
A travers
tout ce sonnet, le poète nous explique à grand renfort d'images et de
métaphores son abattement ainsi que ses troubles mentaux.
Pourtant,
contrairement aux idées reçues, les œuvres d'artistes torturés par un handicap
ou une maladie mentale ne sont pas forcément destructurées, "El
Desdichado" en est l'exemple parfait.
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